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L’expansion viking à l’Ouest, de Lindisfarne au-delà du Groenland

L'expansion viking à l'Ouest, de Lindisfarne au-delà du Groenland

De 800 environ à 1050, on peut dire que les Vikings auront parcouru tous les itinéraires qui s’offraient à eux, non pas d’un seul jet – cela viendra peu à peu – mais par étapes, au fur et à mesure de leurs implantations successives. Si au cours de la première phase de leur expansion, de 800 à 850, qui est de nature plutôt exploratoire, ils se contentent de coups de main, il est clair qu’à partir de 850 et pour un demi-siècle, ils entreprennent de véritables expéditions à but plus ou moins colonisateur pour s’installer à demeure entre 900 et 980. Régis Boyer auteur des Vikings. Histoire et civilisation (Plon, 2002) et traducteur de nombreuses sagas, nous fait partager l’aventure de ces navigateurs qui s’établirent des rivages de l’Angleterre à ceux de l’Islande et du Groenland, et qui, sans doute, « découvrirent » l’Amérique, bien avant certaines caravelles…

La passion de l’aventure et le goût du négoce

Le goût de l’aventure, les possibilités de déplacement que leur offrait leur prodigieux bateau – knörr ou skeid mais jamais drakkar qui est une invention française aberrante – justifient amplement les déplacements des Vikings tant vers l’est ou le sud que vers l’ouest. Il sied de s’attarder un instant sur ce célèbre bateau que l’on vient de nommer : que la passion de l’ailleurs et de l’autrement ait aimanté ces navigateurs de première force qui se déplaçaient, rappelons-le, sans boussole ni aucun moyen de pilotage indubitable, cela va de soi. Qu’ils aient été poussés par une passion viscérale du négoce dont ils étaient familiers depuis que nous les connaissons, il est raisonnable de les en créditer et l’on peut développer à loisir les prétendues causes d’un pareil mouvement. Il reste qu’ils auront été pratiquement seuls à entreprendre de pareilles équipées et ce, pendant deux siècles et demi. Je me propose de les suivre dans leur mouvement vers l’ouest en prenant cette expression stricto sensu, car il convient de noter que par exemple les Danois, majoritairement, partirent vers l’ouest pour dériver presque tout de suite vers le sud. Ils longèrent notamment les côtes de l’Europe occidentale puis méridionale pour franchir le détroit de Gibraltar et se rendre à leur terminus qui était Constantinople, avec toutes les incursions possibles dans les rivières comme la Seine ou le Guadalquivir. Toutefois, le terme de « Danois » ne doit pas être pris au pied de la lettre : les Vikings rassemblaient volontiers toutes les « nations » scandinaves connues aujourd’hui. L’expansion vers l’ouest fut surtout le fait des Norvégiens et aussi des Danois, les Suédois se réservant plutôt la route dite de l’Est. En fait, il suffit de regarder une carte pour se rendre compte que l’immense façade atlantique, ou de la mer du Nord, qui s’offrait à ces navigateurs, commerçants et d’aventure pillards, les appelait vers l’ouest, orientation à laquelle ils seront restés fidèles deux siècles et demi durant.

De Lindisfarne aux Hébrides

Le mouvement démarre avec la mise à sac en juin 793 de la prestigieuse abbaye de Lindisfarne, en Northumberland, où était la prestigieuse châsse de saint Cuthbert : l’usage est de donner cette date, qui marquera durablement l’inconscient collectif des pays visités, pour point de départ de ces incursions. Non qu’il se soit agi d’une véritable innovation. Il est évident, par exemple, que les Norvégiens entretenaient depuis plusieurs siècles des relations de caractère commercial avec l’Irlande du sud notamment. Mais c’est avec le raid sur Lindisfarne que le phénomène prend corps et va procéder par bonds successifs. De la sorte, les Vikings vont découvrir et habiter les Féroë à partir d’environ 800, puis les îles nord-atlantiques, Orcades, Shetland, Hébrides où ils installeront une dynastie de jarls qui aura l’honneur d’une saga – Orkneyinga saga ou Saga des Orcadiens –, puis la corne nord-ouest de l’Écosse, puis le nord de l’Irlande, avec redescente sur l’île de Man, où les fameuses croix runiques existent toujours. Des établissements durables se créeront dans ces lieux ; certains grands chefs ou rois comme Haraldr à la belle chevelure ou Haraldr l’Impitoyable n’ayant pas dédaigné de s’y rendre à des fins belliqueuses.

Le Danelaw et l’Angleterre viking

Le premier témoin important de leur installation s’appelle Danelaw : le territoire qui subit la loi, law, des « Danois » – Danes – le terme d’époque est danelagu. Là, autour de la ville de York – qui existait avant eux mais qu’ils auront rebaptisée, York est la version anglaise du vieux norois Jorvik – où l’archéologie a retrouvé des traces particulièrement intéressantes de leur implantation, ils créeront une sorte de royaume entre 875 et 879 : l’étude attentive des toponymes suffit à prouver la profondeur et la solidité de leur installation. Par conquêtes successives, le Danelaw comprit une bonne partie de la Northumbrie, de l’East Anglia, les Five Borroughs de Stamford, Leicester, Derby, Nottingham et Lincoln et le sud-est des Midlands. Il s’est donc agi d’une bonne partie de l’Angleterre où les usages, les lois, la terminologie administrative scandinaves se sont imposés et dont il est juste de dire que l’Angleterre moderne est en bonne partie sortie. Là encore, s’établira une dynastie norvégienne illustrée surtout par le célèbre Eirikr à la hache sanglante, Eirikir blodöxi. Sans entrer dans le détail d’une histoire fort complexe, contentons-nous de noter que le Danelaw servira de point de départ ou de référence à plus d’une expédition à venir. Parallèlement, des Norvégiens fidèles à leurs anciennes habitudes s’établiront en Irlande du sud notamment – à peu près sur le territoire de l’actuelle Irlande catholique – sous la conduite d’un personnage énigmatique, Turgeis, et au prix de difficiles rapports avec les Vikings du Danelaw. Les Annales – tant irlandaises qu’anglo-saxonnes – ne tarissent pas sur le compte de ces « étrangers » qui finiront par se soumettre au roi Brian Boru après la sanglante bataille de Clontarf – 1014 – où Brian, selon la saga, remporta la victoire et perdit la vie. Il reste que ce sont des Vikings qui ont fondé nombre de villes irlandaises, dont Cork, Limerick, Waterford, Wexford. J’ai précisé que je m’en tiendrais au mouvement plein ouest : il va sans dire, cependant, que la fondation du duché de Normandie, sous l’égide d’un certain flöngu-Hrolfr, que nous appelons Rollon, avec le traité de Saint-Clair-sur-Epte sans doute en 912, participe de ce mouvement mais sans obéir à cette irrésistible poussée vers l’Ouest. Elle se prolongera vers la Bretagne et va nous mener en Islande, la prestigieuse île des sagas, responsable d’une culture et d’une civilisation dans lesquelles il est simplement juste de dire que se sera cristallisé le génie viking, et qui soutient sans peine, en dépit de nos ignorances plus ou moins volontaires, la comparaison avec les plus grandes civilisations de l’Occident.

L’Islande, terre d’élection du génie viking

L’Islande n’était peut-être pas réellement une terra incognita comme on le dit trop rapidement, et il semble bien que les ermites irlandais en avaient fait le point de chute de leur érémitisme en vertu du principe de la navigatio. En tout état de cause, l’île aux volcans – qui n’est pas, malgré une erreur tenace, l’Ultima Thule des anciens – aura été découverte par les Vikings vers 870 et sera le siège d’un mouvement de colonisation qui démarre en 874 pour se prolonger jusqu’en 930. La société qui s’installe là est composée surtout de bœndr – au singulier bondi –, ces paysans-pêcheurs propriétaires libres capables de se réclamer de prestigieux lignages ; elle va développer dès le début un système politique sans équivalent au Moyen Âge, qui n’est ni une république, ni une démocratie, contrairement à une erreur également coriace, mais plutôt une oligarchie ploutocratique. Elle se donne une structure tout à fait originale où les grands chefs de familles pratiquent une sorte de système de « clientèle » et gouvernent le pays selon des lois d’une minutie extrême héritées de la Norvège, pays d’où sont originaires la majorité des bœndr. Détail peu banal : cette nation refusera toute autorité supérieure – ni roi, ni jarl – elle s’auto-administrera par le moyen d’assemblées en plein air, ou things, dont l’organe suprême – althing – siège dans le splendide site de Thingvellir dans le sud-ouest du pays. Pas d’armée, pas de milice ou de police : la marche de cette société – qui perdurera jusqu’en 1264 – est assurée par un subtil jeu d’équilibre entre grandes factions rivales de type familial dont, encore une fois, le mot d’ordre est le respect de la loi que nul ne doit ignorer. Une formule la résume : med lögum skal land byggja en med olögum eyda, « c’est par les lois que le pays s’édifiera, c’est dans l’illégalité qu’il périra ». Cette étonnante nation se dotera en outre de clercs qui consigneront par écrit le trésor littéraire sans lequel nous en serions réduits à balbutier sur le compte des peuples vikings et qui se résume en quelques chefs-d’œuvre sans pareils : les Eddas – trésor de la poésie scaldique –, la poésie la plus sophistiquée, la plus élaborée qu’ait jamais connue l’Occident que ce soit avant elle ou depuis ; les sagas de toutes catégories dont bon nombre – les sagas dites des Islandais et les sagas de contemporains – nous rapportent cette histoire exemplaire ; sans oublier toute une production « scientifique », à l’échelle de cette époque. Le passage au christianisme, officiel et obtenu sans coup férir en 999, favorisera bien entendu cette activité. Il faut seulement souligner que le phénomène islandais s’inscrit de plein droit dans la mouvance de l’expansion viking qu’il résume et pousse à son plein épanouissement.

Si Eirikr le Rouge s’est installé au Groenland…

Nous n’en avons pas terminé pour autant avec ce prodigieux mouvement vers l’Ouest qui demeure la marque majeure de ces hommes et de ces femmes. Il s’agit du fameux Eirikr le Rouge – comprenons le Roux – qui reprend à son compte la thématique développée ici. Pour diverses raisons, il s’embarque en 982 pour un pays qu’un prédécesseur aurait entrevu quelques décennies plus tôt, lors d’une navigation hasardeuse. Après l’avoir abordé, il lui donne le nom de Groenland, terme qui ne signifie sans doute pas, comme on l’a longtemps cru, Pays-Vert. Il s’y installe à demeure après avoir recruté des compatriotes. Ils fonderont là une colonie durable dont l’archéologie n’a pas eu de peine à retrouver les vestiges, dans la partie sud-est de l’actuel Groenland. Divers textes rapportent ses entreprises, mais aucun n’est sûr ; la Saga d’Eirikr le Rouge ou la Saga des Groenlandais, notamment, sont d’évidence des textes controuvés.

…son fils Leifr a-t-il abordé sur les côtes du Labrador ?

C’est de là que partent, vers l’ouest, toujours vers l’ouest, des fils d’Eirikr le Rouge dont un, Leifr dit le Chanceux – Leifr hinn heppni – est censé avoir découvert l’Amérique du nord, Terre-Neuve ou le Labrador. Je suis de ceux qui sont persuadés de l’authenticité de cette découverte. Après tout, une traversée du Groenland à Terre-Neuve n’est pas comparable en termes nautiques à ces prouesses que constituait, pour les Vikings, sous d’autres latitudes, une navigation du Cap Nord à ce qui est aujourd’hui Mourmansk ou Arkhangelsk ; un voyage amplement attesté et qui n’a jamais soulevé la moindre objection. Mais force est de dire que jusqu’à présent, et en dépit de sensationnelles découvertes comme le site de l’Anse-aux-Meadows repéré par les Norvégiens Helge et Anne Ingstad, la preuve scientifiquement irréfutable du fait n’est pas définitivement établie. Trop d’impondérables, trop de collusions avec les Inuits notamment, suscitent ce que l’on peut sans doute appeler une hypercritique. Se pose, par exemple, le problème du fameux Vinland où aurait atterri Leifr : le terme signifierait pays de la vigne – chose difficile à admettre sous ces latitudes – ou pays de la prairie, mais les certitudes sans appel nous font toujours défaut. Il n’empêche : puisque nous parlons de mouvement vers l’Ouest, il est simplement logique de considérer que la progression qui nous aura menés de Björgyn-Bergen, par exemple, à Gardar-Igaliko dans le Groenland du Sud – via Torshavn au Féroë et Reykjavik pour nous en tenir aux points forts – témoigne suffisamment d’une volonté d’aller plus loin, toujours plus loin vers l’Ouest. Si nimbée de légende que soit cette épopée, elle suffit à ruiner par dérision les qualifications de « barbare » qui ne se sont que trop longtemps attachées à elle. 

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